Mais qui est Pascal Boniface ?

Mais qui est donc Pascal Boniface, ce terne mais médiatique donneur de leçons ? Au nom de la géopolitique ou de ses connaissances en football, on le voit partout distiller ses commentaires insignifiants, souvent inintéressants voire faux et biaisés. Pourtant l’homme se plaint d’être « boycotté médiatiquement ». C’est d’ailleurs sa technique pour être invité partout : culpabiliser les journalistes voire les menacer de les désigner comme vendus à un complot ou à un lobby s’il n’est pas invité.

Mais de quel lobby parlons-nous ? L’homme n’est pas bête au point de le nommer. Mais l’esquisse à travers ses sous-entendus. Surtout depuis 2001 et une note fort douteuse à l’intention du Parti socialiste, où il suggère à mots couverts de prendre le parti du camp Palestinien, non pas parce que la cause est juste, mais parce qu’il y a plus de musulmans que de juifs en France et que ce serait donc plus rentable… électoralement. Des statistiques ethniques à la Brice Hortefeux avant l’heure. Nous sommes en avril 2001. Choqués, plusieurs responsables du Parti socialistes demandent sa démission.

Mais l’homme a de la ressource. Un vrai homme d’affaires. Il va se spécialiser dans certains sujets porteurs. Ancien conseiller de Charles Hernu (ancien ministre de la défense), il écrit un livre plaidant pour la dissuasion nucléaire (Intitulé Vive la bombe !) et fait sa thèse, tardive, sur le sujet. Ce qui ne donne pas encore lieu à un poste à l’université… Sans titre ni chaire, mais fort de son statut de martyr du « lobby », il réussit à monter un Institut privé, spécialisé dans les « relations internationales » qui prétend concurrencer l’IFRI : l’IRIS (Institut de relations sociales et stratégiques. 


Grâce à la caution de quelques militaires et élus, qui composent son conseil scientifique, à ses contacts avec le renseignement et un certain talent pour démarcher les politiques, il vend pour une fortune des formations ou des notes à des gouvernements et des entreprises. Comme la Turquie ou le gouvernement français : plus d’un million d’euros de subventions lui seraient versés par le ministère de la Défense et le Quai d’Orsay. Mais ce ne serait pas l’essentiel de ses ressources, d’origine privée, dont il dit simplement qu’elles reflètent la « diversité » (entendez des gouvernements très éloignés de la position française ?) Cela expliquerait les analyses souvent très douces à propos de certaines dictatures que Pascal Boniface distille dans les médias.

Toujours est-il qu’il touche aussi de l’argent public pour des formations et des notes « stratégiques » dont les spécialistes s’accordent à dire qu’elles n’ont aucun intérêt.

En parallèle voire en lien avec ses affaires, Pascal Boniface a un hobby : écrire des pamphlets contre les intellectuels qu’il envie, jalouse ou qui gênent son imposture et les intérêts de ses alliés. Ceux qu’il appelle les « Intellectuels faussaires ». Une vraie liste de règlements de comptes personnels sous couvert d’un propos général. 


En réalité, Boniface met dans le même sac, comme faisant partie d’un grand complot BHLien (très bon filon pour vendre des livres) voire néoconservateur, des gens qui n’ont pas particulièrement de lien avec BHL et surtout pas du tout les mêmes positions concernant la Guerre en Irak, le conflit Israélo-Palestinien ou l’affaire DSK… Leur seul point commun est d'avoir dénoncer l'intégrisme musulman façon Tariq Ramadan, dont Pascal Boniface se fait volontiers le défenseur et même le porte-parole.

Comme Tariq Ramadan, la vérité importe peu à Pascal Boniface, qui ne prend d’ailleurs jamais la peine d’étayer, d’argumenter ou de prouver ce qu’il avance. Il préfère utiliser une méthode de propagande classique : l’amalgame et le procès d’intention. Sans parler de l’astuce de la citation tronquée et truquée, qu’il reproche aux autres, mais dont il est un vrai spécialiste !

L’auteur des « Intellectuels faussaires » est d’ailleurs un habitué des tribunaux. Il a derrière lui une longue carrière de plagiat, de contrefaçon, d’auto-plagiat. Sans parler de « coquilles » à faire rougir BHL et son Botul. Quand il ne pompe pas allègrement ses collègues (des pages entières), il publie plusieurs fois le même livre chez des éditeurs différents, écrit que le Hezbollah est « un parti athée », que Levinas est « un physicien », qu’il n’y aura plus jamais d’attentat de masse (une semaine avant le 11 septembre)…

Un visionnaire donc. Et comme on a le public que l’on mérite, Pascal Boniface est très en vogue sur les sites complotistes, antisémites, islamistes ou d’extrême droite. On peut le voir intervenir aussi bien aux côtés d’Hani Ramadan à l’UOIF (organisation intégriste) comme dans les réseaux pro-iranien d’anciens conseillers du FN. L’arc des soutiens allant des amis de Tariq Ramadan à ceux d’Alain Soral en passant par Bruno Gollnisch et Marine Le Pen. Tous l’utilisent comme référence dans leur lutte contre des « intellectuels » non pas faussaires mais simplement… antifascistes. Autant dire dérangeants pour les amis de Pascal Boniface.

Comme tous les propagandistes ont besoin d’un faussaire, quoi de mieux qu’un escroc pour accuser les intellectuels vigilants d’être des « faussaires » ? L’homme que l’on présente partout, sur tous les plateaux, comme un expert en géopolitique est à la fois capable de faire un contresens complet sur la guerre des chemises rouge et jaune en Thaïlande, de minimiser le caractère autoritaire du régime chinois, de relativiser les liens entre la Syrie et l’Iran et même de qualifier pudiquement le génocide arménien d’ « événements » (en se trompant sur la date)…

On conseillerait bien à Pascal Boniface de se recycler plutôt sur son autre spécialité : le Foot. Hélas, des journalistes sportifs se sont penchés sur son cas et sont formels : l’homme est dramatique, même dans ce domaine. 


Un imposteur complet, donc, qui ne mérite sans doute pas d’avoir vendu 45 000 exemplaires de son dernier livre, comme il le prétend. Heureusement, nous avons vérifié (grâce à Data livre, la base de donnée des libraires) et c’est un mensonge de plus.